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« Le destin de l’Europe en 2024 se jouera à Gaza »

L’historien sait d’expérience comment les opinions s’accommodent progressivement des conflits qui s’installent dans la durée. Il n’en est pas moins troublant de constater que la guerre à Gaza s’est banalisée encore plus vite que celle en Ukraine. Les pertes en Ukraine sont pourtant beaucoup plus militaires que civiles, alors que le cap d’un pour cent de la population tuée est en passe d’être franchi à Gaza. Un chiffre aussi vertigineux représenterait à l’échelle de la France 650 000 morts, dont 250 000 enfants, ainsi que des millions de blessés, de mutilés, de traumatisés et d’orphelins.
Rien ne permet pourtant d’entrevoir la fin d’une telle tragédie. Benyamin Nétanyahou, mais aussi Vladimir Poutine, ont en effet tout intérêt à prolonger le conflit dans la perspective d’une éventuelle réélection de Donald Trump, à laquelle ils aspirent tous deux. Il n’est que temps pour l’Europe de se ressaisir pour éviter un scénario aussi désastreux.
Benyamin Nétanyahou ne joue pas seulement sa survie politique dans la guerre à Gaza. La prolongation indéfinie du conflit est également sa meilleure garantie de conserver son immunité de chef de gouvernement, alors que la triple procédure ouverte depuis 2019 contre lui pour corruption, fraude et abus de confiance risquerait fort de se conclure par une peine de prison. C’est sans doute pourquoi il a assigné à son armée l’objectif plus rhétorique que militaire d’une « éradication » du Hamas, objectif qui a fort peu de chances d’être atteint, même au prix de la destruction méthodique de la bande de Gaza.
Peu importe à Benyamin Nétanyahou, pour qui la poursuite des hostilités est devenue une fin en soi, non seulement pour se maintenir au pouvoir en Israël mais aussi pour affaiblir Joe Biden, dont le Parti démocrate n’a jamais été aussi divisé. Le premier ministre israélien mise en effet avec constance sur le retour à la Maison Blanche de Donald Trump, qui lui avait apporté un soutien inconditionnel de 2017 à 2020.
Benyamin Nétanyahou n’est pas le seul à faire ce calcul. Vladimir Poutine, avec qui le chef du gouvernement israélien a bien plus d’affinités qu’avec Joe Biden, est convaincu que la réélection de Donald Trump lui assurera la victoire contre l’Ukraine. Le président russe émerge dès maintenant comme le grand vainqueur de la guerre à Gaza, tant les démocraties occidentales s’avèrent incapables de défendre au Moyen-Orient les principes de droit au nom desquels elles se sont néanmoins engagées à soutenir l’Ukraine.
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